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Faut-il vraiment réglementer les cryptomonnaies ?

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Alors que l'attention générale est focalisée sur la SEC, l'organisme de régulation de la Bourse américaine, en charge de l'examen pour autoriser la création de trackers (ETF) sur les cryptomonnaies, la Cour des comptes française attire l'attention sur la nécessité de renforcer les contrôles dans le domaine des cryptoactifs.

 

À l'échelle de la zone euro, le marché des cryptoactifs représente une valeur dépassant les 1 500 milliards de dollars fin 2023, avec une base d'utilisateurs estimée à environ 14 millions.

La Cour des comptes souligne que bien que les cryptoactifs aient actuellement un rôle marginal dans le financement de l'économie, leur développement pose des défis en termes de contrôle des flux financiers et de stabilité. En France et en Europe, les autorités publiques ont adapté la réglementation pour encadrer ces actifs numériques.

En France, la régulation a débuté en 2019 avec la mise en place d'un enregistrement obligatoire pour les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) par l'Autorité des marchés financiers (AMF). Entre 2020 et 2023, 90 structures ont été enregistrées, mais seulement une a demandé l'agrément optionnel, imposant des règles prudentielles pour une meilleure gestion des risques.

 

Malgré ces initiatives, le ministère de l'Économie peine à faire face aux opérateurs qui proposent des services en France sans être enregistrés, et les moyens de contrôle sont insuffisants, en raison d'une coopération variable entre les États.

Conscientes de ces risques, les autorités françaises ont contribué à renforcer les règles à l'échelle européenne avec le règlement européen MiCA (markets in cryptoassets), adopté en avril 2023. Inspiré du modèle français, il rend obligatoires à l'échelle européenne les règles qui relevaient de l'agrément facultatif en France.

 

En prévision de l'entrée en vigueur de MiCA fin 2024, le Parlement français a prévu la mise en place d'un enregistrement "renforcé" obligatoire pour la fourniture de services sur actifs numériques en France dès le 1er janvier 2024.

 

Ces évolutions réglementaires augmenteront les missions de contrôle de l'AMF et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Ces autorités devront mener des vérifications plus approfondies dans des délais plus restreints, tout en contribuant aux travaux de la Commission européenne sur plusieurs aspects liés aux cryptoactifs.

Cependant, la Cour des comptes déplore le manque de données de l'administration fiscale sur la détention des cryptomonnaies et les revenus qu'elles génèrent. Pour l'année 2021, seuls 20 000 contribuables ont déclaré des plus-values de cession de cryptoactifs aux services fiscaux, pour un montant total d'environ 400 millions d'euros.

 

En ce qui concerne les transactions non professionnelles, la France applique un régime de taxation à la sortie de la sphère des cryptoactifs. Seule la cession des actifs numériques contre des monnaies fiat, des biens ou des services, est soumise à imposition. Ce régime, bien que simplifié, ne prend pas suffisamment en compte l'utilisation des cryptomonnaies comme moyen de paiement.

 

La Cour des comptes estime que ce régime devrait évoluer, notamment pour tenir compte de la diversité croissante des NFT, dont certains ne seront peut-être plus assimilables à des actifs financiers à l'avenir.

Enfin, la révision des normes européennes de coopération fiscale entre les États, prévue à partir de janvier 2026, devrait améliorer la visibilité des administrations fiscales.